mercredi 3 décembre 2008

La cousine Simone

Silent talking

Ma grand-mère et elle étaient cousines germaines. Je l'ai vue une seule et unique fois, à la Bellière, près de Forges-les-Eaux, où elle vivait alors avec son mari Xavier. Ben oui, il y a TOUJOURS dans ma vie des liens avec la Normandie ! J'avais six ans. Un petit cadeau m'attendait à mon arrivée. Elle avait pensé à moi. Sa gentillesse m'avait touchée. Et puis l'endroit était magique. C'était la campagne. Il y avait dans sa cour une sorte de bassin où glissaient des insectes à longues pattes, dans la chaleur de cette journée d'été. J'avais joué une partie de l'après-midi avec les petits voisins.
Les années ont passé. Après avoir connu les mondanités de la capitale, Simone vivait fort retirée dans sa villa de Cavalaire. Elle était veuve. Elle était entourée de chats. Car les chats, elle les aimait. Elle les soignait, veillait à leur bien-être. Elle se ruinait chez le veto. Elle parlait de ses compagnons défunts avec des larmes dans la voix.
Je crois qu'elle avait fini par préférer leur compagnie à celle des humains...
Elle regrettait la Normandie. Nous nous téléphonions. Un peu de nostalgie, parfois, chez Simone, lorsqu'elle égrenait ses souvenirs de jeunesse de sa voix grave. Ma grand-mère et elle étaient très amies. Je crois qu'elles avaient beaucoup de points communs. Elles faisaient aussi tourner les têtes !
Simone est partie en 2000. Sa fille a demandé que les chats soient euthanasiés. Pensez-vous, ils devaient être tous malades ! Elle parlait de sa mère comme d'une folle. De quelqu'un d'à peine fréquentable. Pourtant, des deux, c'est Simone qui était dans le vrai. Elle avait fait ses choix. Elle suivait son cœur et se souciait peu du paraître. Elle était dans l'amour, le dévouement. Un scandale !
Qu'on se le dise, la connerie n'est jamais du côté des chats !
J'aurais aimé la revoir. Je m'étais promis de le faire. J'aurais traversé la France, en voiture, au train... Mais c'est loin, Cavalaire, et le temps passe. C'est fou comme les futilités vous font dévier de l'essentiel. On se persuade qu'on n'y peut rien. Et je garde toujours des regrets, sinon des remords...
C'est avec Mascaret et son beau regard que je rends hommage à Simone. Le temps n'a pas de prise sur le regard des chats. Mascaret me semble avoir toutes les réponses. Sa sérénité en fait foi. Cette lueur d'interrogation ne s'adresse qu'à moi : "Pourquoi ces questions, pourquoi êtes-vous si compliqués, vous les humains ?".

C'est ce regard qui m'a donné envie de parler de toi, Simone.