dimanche 29 juin 2008

Rendez-vous

Vous n'ignorez plus rien maintenant de mon goût pour les aires d'autoroute. Voilà qui va corroborer cette opinion, mais il s'agit là d'une occasion très spéciale.
Je démarre d'assez bonne heure en ce lundi matin. Autoroutes A2 puis A1, puis direction sud-ouest. Pas d'arrêt sur "mon" aire, je ne veux pas arriver trop tard. Qu'est-ce qui me fait courir aujourd'hui ? J'ai rendez-vous avec les grosses cylindrées qui arrivent droit des Vingt-Quatre Heures du Mans et font halte aux confins de la Normandie. Je me suis trouvée là par hasard il y a trois ans. Prise dans une nuée de voitures toutes plus belles, plus prestigieuses les unes que les autres, alors que je venais acheter une bouteille d'eau. L'année suivante je suis revenue, exprès cette fois-là.
16 juin 2008. Les Vingt-Quatre Heures ont pris fin hier. Une fois de plus l'aire de Bosc-Mesnil accueille ces vagabondes. J'embouque l'autoroute A28. Des paysages familiers éclosent devant mes yeux. C'est un parcours que j'ai suivi bien des fois, à une autre époque. Déjà on croise des véhicules de rêve que j'essaie d'identifier "à la volée" et pas toujours avec succès. Je pousse des "ah" et des "oh". Mais je ne suis pas encore rendue. Il me faut quitter l'autoroute, effectuer un demi-tour sur une départementale puis reprendre la même autoroute dans la direction opposée. Manœuvres indispensables qui m'apparaissent cependant comme une perte de temps tant j'ai hâte d'être sur place.
Nous y voilà. J'ai le cœur qui bat un peu vite. Déception : pas de files de gloutonnes aux pompes à essence pour m'accueillir. Les citoyens britanniques ont-ils manqué le rendez-vous ? Suis-je venue pour rien ?
Mais plus loin, sur le parking, "elles" sont là. Le fougueux troupeau est au pacage, temporairement assagi. J'emprunte allègrement un sens interdit - c'est ça ou quitter l'aire ! - et trouve une place au beau milieu des poids lourds. Il n'y a plus qu'à s'émerveiller, courir partout et faire cliquer le zap.
Je photographie des Aston Martin, des Ferrari qui arrivent à la queue-leu-leu et une chose orange et toute plate - mais spectaculaire - qui est une Lamborghini Murcielago. Beaucoup de Porsche Carrera et de Caterham, ces jolies répliques de bolides anciens. Mais je ne retrouve curieusement pas l'effervescence des années précédentes. Moins de "choix" aussi qu'il y a deux et trois ans. Pas de Maserati, par exemple, une de mes marques préférées. La hausse du prix des carburants a-t-elle un effet sur le moral des heureux propriétaires ?
Et puis on m'a coulé du plomb dans le cœur. Ma Garance n'est plus là. Son absence m'obsède et déteint sur tout ce qui m'entoure. Un voile gris étreint le monde. La lumière est moins vive, l'oxygène de l'air moins abondant. Autour de moi les voitures ont beau parader, étinceler et rugir...
Quand même, le spectacle ne peut me laisser indifférente. Au loin une Countach rouge s'éclipse "ventre à terre". Trop tard ! Elle échappera à mon objectif.
14 heures 30. Je songe à rentrer. Mon "chez moi" n'est pas la porte à côté. D'ailleurs ici le gros de la troupe commence à s'égailler. Albion est encore loin. Même à plus de 200 kilomètres/heure.
Je n'oublie pas, malgré la brièveté de l'incursion, que je suis en Normandie. Rouen est à 40 kilomètres, Dieppe à 35. Frustration. Je laisse une fois de plus tout ce que j'aime derrière moi. Dernier éclat de ce bref séjour automobile, une Cayman bleue me double alors que je vais bientôt quitter l'autoroute. J'aimerais en essayer une. Pour comparer avec la Carrera. "C'est complètement différent", m'a dit un client. Peut-être, mais je voudrais pouvoir m'en assurer par moi-même !
Je rentre épuisée. Trop de kilomètres, trop de décalage. J'ai besoin de repos, de repli. Les voitures de course sont derrière moi, comme un rêve dont je ne suis pas bien sûre d'être éveillée, et j'ai un peu de mal à réintégrer mon décor quotidien.
Les heures qui suivent la Normandie sont encore un peu la Normandie.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Les voitures, les bateaux bientôt? Il faudra faire 40 km de plus...
Nous lirons avec le même plaisir tes commentaires, Rafaèle.