Je vous avais promis de vous parler de mes Auvergnats. Auvergnats métaphoriques, bien sûr, ceux de la fameuse chanson de Brassens. Leurs filles et fils spirituels. Ceux qui allument un petit feu en vous, ou raniment une flamme éteinte. Ils consolent, réconfortent, apaisent les souffrances physiques et morales. D'un regard, d'un geste, d'une parole, ils vous éclairent quand tout est sombre. Ils balaient vos doutes au sujet de l'humanité. Ce sont des femmes et des hommes providentiels. On se demande si on les a mérités.
Il sera question d'une Auvergnate normande, ou du moins rencontrée en Normandie.
Janvier 2002. J'ai décroché un poste dans un organisme à vocation sociale à Rouen. Au bout d'une semaine, je suis devenue la femme à abattre. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Je me sens - ou on me fait sentir - de moins en moins à ma place. Je rame, je n'ai - on ne me donne - aucun point de repère. Février. Ma période d'essai tire à sa fin et des remarques me laissent entendre qu'elle ne sera pas prolongée, tout en me maintenant dans l'incertitude. Mon rêve s'effondre. Je vais devoir quitter la Normandie...
Lundi matin, au retour d'un week-end chez moi. Je sais ce qui m'attend. Visite à la médecine du travail avant de reprendre le boulot. Je ne me fais pas d'illusions. On veut me virer, alors à quoi bon me plier à ce simulacre ?
Formalités auprès de l'infirmière. Le médecin, une femme, me reçoit dans son bureau. La cinquantaine, cheveux blond foncé courts. Je lui expose ma situation, mes angoisses. Elle m'écoute avec une attention extrême. Son regard est intense, pénétrant. Elle me cerne, je crois, très vite. "Ce travail ne vous convient pas", me dit-elle. Nous parlons, peut-être m'a-t-elle examinée, je ne m'en souviens pas. Je ne m'attendais pas à un échange aussi simple, aussi évident. Ça fait du bien. Je retiens un conseil : "Surtout, n'arrêtez pas de fumer maintenant, ce n'est pas le moment !". Je prends de la distance avec ce travail, cette atmosphère délétère surtout, qui ne vise qu'à me faire vaciller. Les cons, c'est eux, pas moi.
Janvier 2002. J'ai décroché un poste dans un organisme à vocation sociale à Rouen. Au bout d'une semaine, je suis devenue la femme à abattre. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Je me sens - ou on me fait sentir - de moins en moins à ma place. Je rame, je n'ai - on ne me donne - aucun point de repère. Février. Ma période d'essai tire à sa fin et des remarques me laissent entendre qu'elle ne sera pas prolongée, tout en me maintenant dans l'incertitude. Mon rêve s'effondre. Je vais devoir quitter la Normandie...
Lundi matin, au retour d'un week-end chez moi. Je sais ce qui m'attend. Visite à la médecine du travail avant de reprendre le boulot. Je ne me fais pas d'illusions. On veut me virer, alors à quoi bon me plier à ce simulacre ?
Formalités auprès de l'infirmière. Le médecin, une femme, me reçoit dans son bureau. La cinquantaine, cheveux blond foncé courts. Je lui expose ma situation, mes angoisses. Elle m'écoute avec une attention extrême. Son regard est intense, pénétrant. Elle me cerne, je crois, très vite. "Ce travail ne vous convient pas", me dit-elle. Nous parlons, peut-être m'a-t-elle examinée, je ne m'en souviens pas. Je ne m'attendais pas à un échange aussi simple, aussi évident. Ça fait du bien. Je retiens un conseil : "Surtout, n'arrêtez pas de fumer maintenant, ce n'est pas le moment !". Je prends de la distance avec ce travail, cette atmosphère délétère surtout, qui ne vise qu'à me faire vaciller. Les cons, c'est eux, pas moi.
Il s'est passé quelque chose. Cette femme m'a insufflé un peu de force. Elle m'a comprise, a cru en moi.
Le soir je suis proprement éjectée, comme je le savais, sur des motifs dérisoires. Je ne suis pas dupe. Je pense à ma rencontre du matin, à cette femme extraordinaire, et la violence de ce moment - car c'est bien de violence qu'il s'agit - glisse et m'atteint moins qu'elle n'aurait dû.
Je m'étais promis d'écrire à ce médecin, et puis... Je me serais sentie ridicule...
Le soir je suis proprement éjectée, comme je le savais, sur des motifs dérisoires. Je ne suis pas dupe. Je pense à ma rencontre du matin, à cette femme extraordinaire, et la violence de ce moment - car c'est bien de violence qu'il s'agit - glisse et m'atteint moins qu'elle n'aurait dû.
Je m'étais promis d'écrire à ce médecin, et puis... Je me serais sentie ridicule...
Des Auvergnats il y en a d'autres. Oui, oui, je vous en parlerai. Je le leur dois. Ce sont des sauveurs. Pour employer une expression à la mode, c'est mon devoir de mémoire. Mais plus qu'un devoir, c'est un besoin.
Mes Auvergnats sont au-delà de la gratitude. Je ne les oublierai jamais.
5 commentaires:
Pour celles et ceux qui lisent ton blog, Rafaèle, c'est toi l'Auvergnate qui réchauffe les cœurs, à la chaleur qui rayonne du tien.
« N’oubliez pas l’hospitalité(du coeur); car en l’exerçant, quelques-uns ont logé des anges, sans le savoir.»
Bisous du vendredi et à bientôt
Maman mule
Ce blog rayonne d'une force positive... il y a des rencontres incroyable !
Allez viens chez moi,voir mon atelier, le tsunami a sévi aussi ! Viens allumer le feu à mon blog pour le petit jeu de l'atelier proposé par "L'atelier de SÔ !
Certaines rencontres fugaces insufflent plus de force et de réconfort qu'un escadron d'amis réuni. La dureté de notre époque, sa tristesse, son égoïsme idiot, donnent plus de valeur encore à l'écoute, au regard porté sur soi lorsque il est teinté de bienveillance.
cette femme a été vraiment attentive,et c'est rare!la plupart pose des questions sans écouter la réponse.
quel bel hommage...
biz
Enregistrer un commentaire