vendredi 26 septembre 2025
Le tunnel fantôme, un billet de terreur horrible !
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vendredi 18 avril 2025
Chalet de Blanquetaque : les chasses du comte Auguste
"Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, de peur de ne jamais te perdre !"Rabbi Na'hman de Breslev
Voici quelques jours, donc, je quitte Saint-Valery en fin d'après-midi après avoir lancé le GPS de mon téléphone, déterminée à poursuivre ma quête et dénicher le relais de chasse du comte Auguste Henri Ernest d'Hardivilliers. La voix féminine qui sort du haut-parleur est censée me guider jusqu'au "Gué de Blanquetaque". Las ! La première route indiquée est un chemin de terre ou plutôt de calcaire concassé qui s'enfonce entre deux taillis. Ce n'est sûrement pas là ! J'interroge à nouveau l'oracle synthétique qui m'enjoint à poursuivre ma route, à tourner à gauche, puis encore à gauche. Il me semble que ces détours insensés m'éloignent de mon but, et je commence à douter sérieusement. Enfin, dans une sorte de cul-de-sac, la "route" continue, mais sous la forme d'une piste blanche caillouteuse et poussiéreuse que n'empruntent sûrement que des engins agricoles.
https://inventaire.hautsdefrance.fr/dossier/IA80007323#historique
Illustration : La maison près de la voie ferrée, Edward Hopper
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lundi 3 juin 2024
Originaire (parce que c'est amer)
"Il faut partir au moins une fois pour aimer revenir."
Mon installation en Normandie a fait de moi une originaire. En d'autres termes, une imbécile heureuse qui est née quelque part.
J'ai pris conscience de cette métamorphose il n'y a pas si longtemps. Il ne s'agit pas tant, d'ailleurs, d'un bouleversement intérieur que d'une prise de conscience des multiples facteurs qui m'ont façonnée durant plusieurs décennies. D'une appartenance. Si j'en conçois une quelconque fierté ? Non.
Suis-je de là-bas, ou d'ici ?
Mais qu'est-ce qu'un originaire ? Le premier répertorié (et le plus illustre) est sans doute Énée, le fondateur de Rome. Lors de la chute de Troie, il doit se tirer en catastrophe de la cité accompagné de quelques-uns des siens, dont son fils et son vieux père Anchise juché sur ses épaules. Cet épisode dramatique de la mythologie est connu sous le nom de "tirade d’Énée".
On distingue deux catégories d'originaires : les individus qui se fondent dans la masse et les individus folkloriques. On peut être tantôt l'un, tantôt l'autre. Je suis folklorique quand j'emploie des mots et expressions de chez moi, en rouchi, la variante dialectale du picard parlée dans le Hainaut. Ce langage, je ne l'ai jamais, ou très peu, pratiqué dans ma région natale. Aujourd'hui son usage relève de l'hommage à ce que mon héritage culturel nordiste a de plus sacré. Et d'un petit brin de nostalgie...
Mais revenons à Enée. Une fois posé son sac (et son père), il n'a pas fait comme les Romains, puisque ceux-ci n'existaient pas encore. Il épouse la fille du roi local. Il fonde Lavinium, la future Rome. Les gens du cru disent de lui : "C'est un de Troie". A l'inverse du prince troyen, je n'ai pas fondé de ville en Normandie : tous les terrains étaient déjà pris. Je me suis donc contentée de trouver un lieu qui m'accueille, de me définir une place, de tenter de "faire mon trou" (sinistre expression... non ?). Tantôt discrète, tantôt folklorique.
Et ce Nord que j'ai quitté m'est arrivé en pleine figure. Il m'a tendu un miroir où des personnages en tenue de carnaval paradaient sous la pluie, dans la nuit déjà tombée.
J'ai entendu le Nord et son appel féroce. (Hé, c'est un alexandrin !)
Parmi les manifestations les plus symptomatiques (je dirais même pathognomoniques) de ma norditude, se distingue l'amour de l'endive. Je me régale à présent des fameux chicons, alors que tout au long de ma vie je les ai copieusement détestés, que dis-je, fuis sous toutes leurs formes. Exception faite des endives braisées fondantes que préparait ma grand-mère. Mais cela fait si longtemps... Pierre Desproges consacre à ce végétal une entrée de son Dictionnaire superflu à l'usage de l’élite et des bien nantis. Il en souligne l'exploit paradoxal d'unir un sommet de fadeur à un apogée d'amertume.
J'aimais beaucoup Desproges. Mais depuis que je suis originaire, je lui donne tort. J'ai découvert (ou redécouvert) ce croquant et cette amertume même qui, en salade, assaisonnés d'huile d'olive, de vinaigre de cidre - (ou de vinaigre de bière normand) et d'échalotes ciselées, m'enchantent. Je mesure l'ampleur de ce que j'ai perdu en méprisant le chicon la majeure partie de mon existence.
parce que c'est amer
Et parce que c'est mon cœur ?*
La Normandie a révélé mon identité nordiste. A moi-même, sinon aux autres.
J'ai perdu le Nord. Mais j'ai gagné l'endive.
Illustration : Énée fuyant Troie, Girolampo Genga, Pinacothèque de Sienne
La phrase placée en exergue est tirée du roman d'Ines Cagnati, Mosé ou le Lézard qui pleurait.
*Extrait du poème Dans le désert de Stephen Crane :
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mercredi 8 mai 2024
"Trop grande pour moi" (hêtraie à voir)
Tout a commencé avec une photo. Une photo de vacances en noir en blanc, prise alors que j'ai six ou sept ans. Je pose devant un monument aux morts ou un mémorial dont la forme est celle d'une croix de Lorraine inscrite dans le "V" de la victoire.
Quelques décennies plus tard, cette image, retrouvée parmi une poignée d'autres, est une énigme. Et je dispose de peu d'indices.
J'ignore où se trouve ce monument, j'ignore de quelles vacances il s'agit, le dos de la photo ne comportant ni lieu, ni date.
Je sais seulement que c'est "quelque part en Normandie".
Devant le fiasco de la recherche par image de Google, je dois me transformer en détective. Je ne lâcherai pas le morceau.
Après quelques heures de cyberfouilles infructueuses, la lumière vient d'un site qui recense les monuments aux morts par département. Mon cœur bat plus vite. Je reconnais sur la page la croix dans son "V". Elle est maintenant peinte en marron, et non plus blanche. Mais son identification ne fait aucun doute. Le nom du lieu et l'histoire du mémorial sont précisés. Je peux maintenant dater ces fameuses vacances, juillet 1970. La famille passait un mois dans une maison à colombages au Tronquay, dans la forêt de Lyons-la-Forêt, "la plus grande hêtraie d'Europe", si j'en crois Wikipédia.
Qu'a donc cet été-là eu de si spécial ?
Au Tronquay les distractions étaient rares. Nous allions acheter du lait à la ferme dans un grand bidon en fer. Les jours de pluie nous jouions au "Cochon qui rit". Les autres jours (nous en comptâmes quelques-uns), nous parcourions longuement les environs à la découverte de sites marquants ou de curiosités architecturales. Il y eut ainsi, au cœur du massif forestier qui ondule et s'étire sans fin, des visites en des lieux chargés d'une mémoire trop grande pour moi. Des lieux qui m'ont durablement impressionnée, sans que je puisse définir l'origine de cette empreinte confuse et vaguement sinistre : une chose qui se ressent et ne s'explique pas.
Je me souviens tout particulièrement de "l'Allée des trous" (ou "des cachots"), où des événements funestes avaient dû survenir. Les adultes qui m'entouraient parlaient d'un convoi allemand attaqué par des résistants. La densité des fûts, alliés végétaux, le relief accidenté étaient propices aux coups de main et aux embuscades nocturnes. Sitôt leur action accomplie, les maquisards avaient enfoui les camions dans un repli de ce terrain dont ils connaissaient parfaitement la topographie. Je me figurais alors des tombeaux, des soldats morts ensevelis avec leurs véhicules. Mon jeune esprit était confronté à une solennité saisissante et muette, qui me semblait déjà
dissimuler une horreur informulée. Les lieux étaient baignés
d'étrangeté et, pour tout dire, hantés. Et ces spectres étaient sans visage.
Je n'en avais pas l’idée précise à six ans, mais c'est la mort qui était là, omniprésente, terrifiante. La mort avec des murmures, des cris, des guet-apens, des rafales de mitraillette, des exécutions sommaires, des corps mutilés enterrés à la hâte, de brefs éclats de lumière dans l'obscurité de la forêt et de la nuit. J'étais incapable de définir précisément l'épouvante ressentie, ni seulement l'extérioriser.
Longtemps j'ai cru à de faux souvenirs, faute de "preuves". Avais-je rêvé ? Mon enquête sur la photo mystérieuse m'a fourni des éléments concrets et permis d'entrevoir la raison ces visites : l'intérêt de mon grand-père maternel pour la Résistance. Il était manifestement sur les traces des groupes de maquisards ayant opéré dans la région. J'ai pu identifier deux d'entre eux : les Diables Noirs à Saint-Denis-le-Thiboult, le maquis de Mortemer.
Une fois ces certitudes acquises, j'ai commandé un ouvrage qui devait, pensé-je, m'en apprendre un peu plus sur cette époque, dans cette région. Curieusement, la couverture du bouquin reflète assez bien la représentation cauchemardesque née de mon imagination...
Il ne tenait qu'à moi, me suis-je dit, de refaire ce parcours. Sur les traces de faits que je connais - un peu - à présent. Sur mes propres traces.
Je suis allée à Lyons-la-Forêt, "la porte à côté" ou presque à présent, en avril l'an dernier et cette année encore. Nulle part, pas même dans les petites rues paisibles du village, la femme n'a rencontré la petite fille de six ans effarée par le poids d'une mémoire qui n'était pas la sienne. Comme s'il se fût agi d'un autre être, d'un double perdu dont j'aurais été séparée. A l'instar du lit de Procuste, le calque du présent ne coïncidera jamais avec celui de mes souvenirs d'enfant.
Je n'ai pas vraiment cherché le monument de Saint-Denis-le-Thiboult, en Seine-Maritime, mais je sais dans quel hameau le trouver. En revanche j'ai découvert des édifices dont j'ai appris l'existence au cours de mon "enquête", comme une étrange chapelle solitaire au milieu d'un herbage. Un nouveau mystère...
Après avoir quitté Lyons, alors que la route monte et descend et serpente et fend la hêtraie, je pensais à ces ombres hésitantes à la lisière de la mort et de la vie que j'avais pressenties l'été soixante-dix. Et je me disais qu'en dépit des années écoulées et d'une meilleure connaissance des faits historiques, une petite part de moi-même restait captive de la forêt ensorcelée. Des arbres meurent, des arbres poussent. Mais la forêt se souvient, et sa "dimension invisible" subsiste.
Comme sur les départementales de la Somme, le silence s'imposait. Face à des choses circonscrites dans le temps et l'espace que nous ne pourrons jamais connaître, nous n'avons plus les mots. Et, aujourd'hui encore, j'ai peine à formuler ce que j'éprouve : ombres inquiétantes, présences silencieuses - fantômes.
Je crois que la mémoire des tragédies qui se sont autrefois jouées ici sera toujours "trop grande pour moi".
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dimanche 10 mars 2024
L'orage et la loutre, triple énigme
Je ne sais, non plus, si Lucien Ganiayre a voulu cette obscurité. Quoi qu'il en soit, elle appartient au mystère de l’œuvre...
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dimanche 18 octobre 2020
Rouge d'automne
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dimanche 26 janvier 2020
Astro-effervescence
Prendre de la hauteur... On aimerait bien. On aimerait bien pouvoir plus souvent. Vis-à-vis, par exemple, d'un monde où des malfrats en cavale, et avec quel aplomb, se vantent de leurs forfaitures devant des journalistes qui semblent acquis à leur cause, ou pour le moins fascinés.
Nos héros étaient des grands Résistants, des libérateurs, des visionnaires, mystiques ou profanes, des combattants. Des valeureux, des braves, des intrépides, des femmes et des hommes qui incarnaient ce que nous aimions, ce que nous aurions aimé être. Ils possédaient les attributs attachés aux êtres d'exception, courage, droiture, talent, clairvoyance, désintéressement, vertus que nous appelons aujourd'hui "valeurs", et qui ne sont sans doute plus les mêmes qu’autrefois... Nous admirions les aventuriers, les astronautes, les explorateurs arpenteurs des espaces inconnus, les grands sportifs, les savants aux découvertes révolutionnaires, les artistes et les écrivains qui plongeaient mains et bras dans l'âme humaine et en remontaient des flots de gadoue qui charriaient parfois quelques diamants. Des qui laissaient dans leur œuvre leur santé, leur raison, parfois leur peau. Tous détenaient une autorité morale et intellectuelle. Elles et ils étaient des voix. Quand ils parlaient, on la fermait. Parce qu'ils ne parlaient jamais pour ne rien dire.
A défaut de tout percuter (même si le discours des savants que j'ai pu entendre est remarquablement clair), je me dis que si le temps "ontologique" n'existe pas, on ne peut par conséquent pas le perdre... CQFD !
Au sein de ce vertigineux système dont certaines des lois nous échappent toujours, le bipède humain se sent bien chétif. Pascal n'en affirme pas moins la supériorité de ses semblables face à l'immensité muette. Mais quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, parce qu’il sait qu’il meurt, et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien. Il n'est pas certain que cette pensée nous console...
Faire parler l'espace à travers les signaux les plus lointains qui nous en parviennent, mettre la matière sur le grill pour lui arracher ses ultimes secrets et, oui, penser ce qui ne peut être pensé de notre point de vue limité d'humains, penser ce qui nous dépasse... Peut-être que, finalement, cet impensable rejoint d'autres impensables, aussi irréductibles que la perte, le deuil, l'absence... Et peut-être est-ce en cela que les colossaux défis auxquels se mesurent les physiciens m'interrogent. Mais ce sera, je pense, l'objet d'un prochain billet.
Puisque les félins ne sont jamais bien loin, on ne peut faire l’impasse sur le chat de Schrödinger, exemple au moyen duquel le savant allemand voulut démontrer qu'en physique quantique, deux états opposés peuvent coexister simultanément pour un même "quanta" (de matière ou d'énergie). Mais rassurez-vous, ce postulat n'est valable qu'au niveau subatomique, et JAMAIS le célèbre physicien ne plaça un chat dans un caisson pour réaliser cette expérience mortifère, qui reste du seul domaine de la pensée !
Je suis par ailleurs certaine que les chats (il n'est qu'à observer leur comportement) ont, ou résolu toutes les énigmes de l'univers, ou s'en f... royalement.
Une brève histoire du temps, de Stephen Hawking, est édité chez J'ai Lu.
Écrits vagabonds, de Carlo Rovelli, chez Flammarion. Ce livre m'attend sur ma table de lecture. Rovelli, que j'ai écouté sur France-Culture dans La conversation scientifique du 30 novembre 2019 ("Le temps est-il une illusion ?") m'a l'air d'un homme fort sympathique, qui cite à plusieurs reprises les chats et parle de sa fascination pour l'intelligence des poulpes.
Illustration : couverture de la revue Comprendre les sciences (septembre 2019).
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Rafaèle
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